Ursula K. Le Guin

Ursula K. Le Guin, L’anniversaire du monde (et autres nouvelles)

Voilà, j’ai décidé de m’y mettre, enfin. Il est temps de vous présenter l’auteure qui m’impressionne le plus.
Ursula K. Le Guin est auteure de Science-fiction est Fantasy, mais elle aussi sociologue et ethnologue. Elle n’est plus toute jeune, mais elle écrit toujours (une trilogie « jeunesse » s’est achevée l’année dernière…), et pour plus d’infos je vous renvoie à sa biographie (ou wikipédia si vous préférez…).
Elle est généralement connue pour avoir écrit les contes de Terremer (repris par les studio Miyazaki…), et le Cycle de l’Ekumen (ou Oekumen). Et pour avoir remporté un nombre impressionnant de prix pour La Main gauche de la nuit.
Personnellement, je n’ai pas lu Terremer, qui est plutôt du côté de la Fantasy, tandis que les histoires du Cycle de l’Ekumen sont de la Science-Fiction. 

L’anniversaire du monde (voir critiques) fait partie du Cycle de l’Ekumen. En fait, c’est un peu comme une vue d’ensemble de tout l’univers de l’Ekumen. Au départ, les habitants de la planète Hain ont « colonisé » et étudié de nombreuses planètes, puis ils se sont rendus compte de leurs erreurs et ont fini par créer une sorte d’organisation pacifique de coopération à l’échelle de l’univers : l’Ekumen, qui est une sorte de médiateur entre tous les mondes. 
L’anniversaire du monde est un recueil de nouvelles, dont l’intrigue a lieu dans des planètes où il y a encore peu d’ambassadeurs de l’Ekumen, mais leur présence est visible et c’est parfois à travers eux que ce déroule l’histoire.
Il est difficile d’expliquer à quel point l’univers de Le Guin peut avoir des contradictions, être continuellement en expansion, et fini à la fois. Ses histoires représentent à peu près ce que doit être pour moi la Science-fiction : des découvertes, des surprises, des choses que l’on aurait pas pu inventer soi même, des constructions de l’esprit.

Et on arrive ainsi à la seconde « partie » du recueil de Le Guin : la partie anthropologique, ou ethnologique (difficile à dire !). Chaque histoire présente une société qui fonctionne de manière différentes (entre elles dans l’Ekumen, et bien sur différente de la nôtre, ou même « des nôtres » sur Terre…). Ce qui fait la particularité de Le Guin, c’est que les sociétés qu’elle représente sont régulées par un système central qui est… difficile à expliquer ! On pourrait dire « le couple », « la sexualité », « le genre », on ne toucherait pas encore le cœur ! Dans son best-seller La Main gauche de la nuit, Le Guin avait déjà présenté une société étrange,  à nos yeux, où le sexe d’un individu peut changer, il peut être homme ou femme, et où les relations amoureuses ne sont pas définies par le sexe. Dans son recueil de nouvelles, on trouve encore de nombreuses combinaisons différentes. Par exemple, sur la planète O le mariage se fait entre quatre personnes, qui comporte deux hommes et deux femmes, mais doit aussi respecter les règles des « tribus » : la « tribu » du Jour, et celle de la Nuit. Pour expliquer la suite, il faudrait un schéma (même si Le Guin n’en a pas besoin pour nous le raconter !), pour présenter ce mariage où les relations intimes entre personnes de la même « tribu » sont considérées comme de l’inceste. Il y a aussi dans ces nouvelles un monde où les femmes et les hommes vivent séparément, et où la virilité de l’homme est très importante et se traduit par une compétition quotidienne intense, par des jeux chevaleresques,  tandis que les femmes gèrent tout le fonctionnement du monde à côté.

Le Guin énonce aussi un principe qui me semble fondateur à partir de ses récits : c’est le principe « d’éthique de la connaissance » qui régit les rapports entre les « extra-terrestres ». En effet, ce principe repose sur le constat que l’arrivée d’un ambassadeur venant d’une autre société peut avoir des impacts sur une autre société, lorsqu’elles sont différentes. Ainsi, le transfert de connaissances d’une société à une autre doit se faire avec parcimonie et réflexion, au risque sinon de se retrouver avec des sociétés qui se verraient changer à cause de l’apport d’un autre point de vue, et verraient donc tout leur système s’effondrer. Ce principe me semble important car il permet de comprendre l’impact d’un observateur sur le monde… Et les risques qui s’ensuivent. La plupart des nouvelles où arrivent des ambassadeurs de l’Ekumen voient d’ailleurs les sociétés se confronter à la différence, et les changements qui s’opèrent ensuite… pour le meilleur ou pour le pire !

Je pourrais continuer encore longtemps sur ces sociétés, qui viennent à mon sens d’un esprit brillant, capable de se sortir presque complètement de son système de pensée pour imaginer des associations étonnantes.

Au final, Le Guin et ses histoires représentent pour moi ce que doit être la science fiction, avec une touche de sociologie… Ou bien est-ce la sociologie qui devrait être au final de la science-fiction ? Je vous laisse méditer…