Roman 548754545454 et des poussières : Première partie – Chapitre 1

Cela doit bien faire six fois que je relis ce chapitre, et pourtant j’ai toujours l’impression qu’il manque quelque chose, de la substance, une connexion entre les phrases… Je pense aussi qu’il est très difficile de parler rétrospectivement du ressenti d’un enfant, ce qui rend parfois les choses un peu abruptes… Enfin bref, les critiques sont très attendues !!!


 

Première partie – Les pionniers

Chapitre I : Rédemption

             Je n’ai que très peu de souvenirs de mon enfance, mais il en est un qui est toujours resté dans mon esprit. Mon frère venait d’être diplômé, il était un élève brillant avec deux ans d’avance. Nous avions fêté l’évènement dignement dans le salon, à la lueur de quelques bougies, rescapées du rationnement. Le repas était simple, mais la simplicité était à l’époque un luxe que tout le monde ne pouvait pas s’offrir. Mon père avait levé son verre, et ma mère avait les larmes aux yeux. Je me souviens particulièrement bien du gâteau que nous avions mangé : chocolat et framboises du jardin. J’avais été les cueillir dans l’après-midi, et des avions étaient passés au dessus de ma tête comme les étoiles filantes que nous voyons au mois de Juillet. Ma mère m’avait attrapé la main et faite rentrer brusquement. Si elle pleurait ce soir là, c’était de joie. Mon frère était diplômé et sa réussite lui promettait un travail qui ne l’enverrait pas sur le champ de bataille. Il resterait à l’arrière, sans avoir à payer de sa propre vie. Je n’ai compris toute ces choses qu’après de longues années, mais elles étaient déjà gravées dans ma mémoire à jamais.

            Les messages de propagande qui étaient affichés sur les murs me reviennent souvent en tête. « La liberté nous appartient ». « Nos combattants protègent vos familles ». « Le mal sera éradiqué ». J’étais encore trop jeune, à peine une dizaine d’années, mais je ne savais pas ce qu’était la paix, je n’avais connu que la guerre. Elle était là depuis ma naissance, derrière chaque abri et dans nos privations. J’avais une haine contre les autres, les ennemis, sans réellement comprendre ce qu’était cette haine, ni son origine. La guerre était en nous, elle faisait partie de notre vie. Et pourtant, elle était si loin. Je n’avais aucune idée de la distance à laquelle se trouvaient nos ennemis.

            Si je me souviens si bien de cette soirée, c’est aussi à cause des évènements qui ont suivi. Le lendemain de la petite fête, ma mère avait préparé des vêtements légers. Il faisait très beau dehors, et j’avais accroché un bracelet blanc à mon poignet, en signe de paix. Mon frère était déjà parti lorsque je franchis la porte de la maison, adressant un signe de la main à mes parents, encore dans la cuisine. En levant les yeux vers le ciel, je vis tomber des objets sombres, comparables à des oiseaux en chute libre.

Et l’explosion retentit.

            Je me retrouvai face contre terre, la vision troublée. Il me semblait distinguer quelques graviers à côté de mon nez, mais leur couleur rouge me semblait inappropriée, presque trop vive et trop criarde. Je sentis quelqu’un me retourner et la lumière du soleil m’aveugla un instant. Le visage de ma mère apparut, ses lèvres semblaient bouger à toute vitesse mais je n’entendais rien. Je n’entendais plus rien. Alors je fermai les yeux.

            Lorsque je les rouvris, je me trouvais dans une salle d’hôpital, avec de nombreuses autres personnes à côté de moi. Mon père me tenait la main et regardait d’un air angoissé l’écran qui se trouvait sur le mur d’en face. En portant ma main aux oreilles, je sentis un bandage entourer ma tête. Mon père me montra une feuille avec écrit « tympan abîmé ». Rien de grave, comparé aux autres. Des images horribles étaient diffusées, et je compris enfin ce qu’était la guerre. La violence et la souffrance. Le sang et les larmes.

Toutes les écoles du pays, sans exception, avaient été attaquées en même temps. Un massacre sans précédent, qui arrivait si tard dans cette guerre dont on avait même oublié l’origine.

            Mon père me fit tourner la tête pour m’empêcher de suivre le reportage, mais il était déjà trop tard, j’avais vu ce qui était arrivé, je ne pouvais plus l’effacer. Des larmes coulaient sur mes joues, je ne savais pas d’où elles venaient. Je me réfugiais alors dans le silence, ne comprenant pas plus qu’avant ce qu’il se passait.

            Je sortis de l’hôpital quelques heures plus tard. Les infirmiers nous prièrent de partir au plus vite, le flux des patients aux blessures graves ne se tarissant pas. Mon père me raccompagna à la maison, en posant sa main sur mes yeux pour m’empêcher de voir les blessés, mais les cris et les râles qu’ils poussaient étaient tout aussi angoissants.

La médecine faisait des miracles, et je pouvais peu à peu entendre des sons parvenir à mes oreilles, ou du moins à celle encore valide. Une fois au lit, je ne pu m’empêcher d’allumer l’écran du salon. L’image se brouilla un peu, et je tapotai sur le mur en espérant qu’il ne finisse pas ses jours maintenant. Des reportages sur des écoles défilaient à l’écran, et je repérai la mienne. Il ne restait plus qu’un tas de cendres et quelques plaques métalliques aux bords fondus. Mon école n’existait plus. Je ne pensais pas que de telles choses pouvaient se produire, mais c’était la réalité, une réalité écrasante.

-Tu ne devrais pas regarder cela Lil.

Je sursautai, et vis mon frère prostré derrière moi. Je ne l’avais pas entendu arriver. J’étais tellement inquiète pour lui que je couru dans ses bras. Il aurait pu se trouver à proximité de l’école, n’importe où, en danger.

-Eh là ! Reste calme, tu es encore blessée.

-J’ai… j’ai tellement peur !

-Je sais.

Les mots étaient coincés dans ma gorge, je n’arrivais pas à exprimer ce que je ressentais au fond. De l’injustice, de la colère. De l’incompréhension ?

-Pourquoi ? criai-je alors, Pourquoi ont-ils fait ça Ian ? Pourquoi ?

-Ils voulaient nous effrayer, nous faire renoncer à continuer cette guerre, nous aurions fini par faire la même chose, répondit-il froidement.

-Je… je ne comprends pas.

-Il n’y a rien à comprendre, Lil. Tu devrais essayer d’aller dormir, maman ne va pas rentrer ce soir, elle doit travailler. Je peux rester près de toi si tu veux.

-Oui, je veux bien.

            Je m’endormis dans le bras de Ian, qui dessinait des vagues sur mon front pour m’apaiser. Ses yeux gris semblaient perdus dans des réflexions hors de ma portée. Plusieurs cauchemars me réveillèrent, mais il était toujours là pour me calmer et me réconforter. Je vis dans les moments les plus sombres de la nuit des formes monstrueuses s’emparer de mes camarades de classe un par un. Des flammes brûlaient autour d’eux et ils mouraient chacun leur tour. Les survivants étaient trop peu nombreux.

            Quelques jours après les attentats, lorsque tous les blessés furent guéris et tous les morts enterrés, le chef du gouvernement prit la parole. Son discours fut retransmis à chaque personne encore vivante et imprimé sur des livres distribués à toute la population. Il fut nommé « La Rédemption » et lorsque les écoles furent reconstruites, nous l’apprîmes toutes et tous par cœur. Je peux encore le réciter dans ma tête avec sa voix grave et posée.

« Mes chers concitoyens.

Notre pays traverse une crise des plus terribles, ce qui m’a amené à discuter avec tous les représentants des pays du monde, amis comme ennemis. Les actes perpétués envers les jeunes générations ont heurté le monde entier, quelque soit le camp. J’ai choisi de mener une discussion avec ces représentants en tant qu’émissaire de la paix. Notre pays a trop longtemps souffert, et l’enjeu qui nous semblait au départ si important n’a plus aujourd’hui de poids face aux atrocités commises. J’ai donc choisi personnellement de tendre ma main aux diverses nations, et j’ai pour vous des nouvelles qui pourraient apaiser votre cœur.

Il n’y aura pas de société juste et égalitaire tant que l’honnêteté n’aura pas régit ce monde. Et cette voie vers l’honnêteté nous est à présent ouverte, il suffit de la saisir.

Je souhaite donc vous présenter aujourd’hui l’œuvre de nos plus brillants scientifiques, qui ont travaillé sans relâche à un projet qui représente l’espoir pour tous les peuples en guerre. Voyez-vous, le mensonge, les trahisons, la lâcheté et les désirs de chacun sont nos propres ennemis, et ils nous empêchent de communiquer sereinement. Ces scientifiques ont donc conçu un moyen de communication sans mensonges et tromperies, un moyen pacifié. Ce moyen s’appelle la Vérité, et elle est obtenue à partir d’un sérum vivant, inséré dans un cerveau pour convertir les ondes qu’il émet et reçoit. Nous avons dès maintenant le moyen de partager nos pensées. Et je crois que le partage de la vérité est l’unique moyen d’obtenir la Paix.

C’est pourquoi j’ai pris la décision -quelques secondes après avoir assisté aux attentats- de me faire injecter ce sérum, là où vous pouvez voir une fine cicatrice. J’ai alors été voir les représentants du monde entier avec une proposition : partager leurs pensées avec les miennes, communiquer tous ensemble sans se mentir, car le mensonge est impossible lorsque des personnes communiquent par la pensée. Je leur ai proposé d’explorer nos vices et nos vertus, nos plus profonds sentiments, dans le but de la paix.

Je suis heureux de vous annoncer que le dialogue s’est en partie bien passé. Nombre des représentants ont accepté de participer à cette expérience avec moi, et passé les quelques moments de désarroi, nous avons réussi à communiquer et arriver à un accord.

 

La guerre est finie, elle n’existera plus avec les pays consentants. Ceux qui n’ont pas signé le traité seront séparés de nous par des frontières infranchissables, et nous avons pris cette décision sans ressentiment. Vous êtes à présent les habitants du Monde Libre et nous devons mettre de côté nos peines pour mieux nous reconstruire.

Longue vie à tous, et puisse la Vérité guider votre chemin.»

La première réaction de mon frère à la fin du discours fut d’émettre un rire étrange. Je le vis lancer un regard à ma mère, dont les yeux étaient rivés sur ceux de mon père. Je n’avais pas très bien compris ce qu’il venait de se passer, le discours avait été trop complexe pour moi, toutefois, je sentais que quelque chose était en train de changer. Le discours mentionnait la fin de la guerre, il promettait la fin des bombardements et de la peur. Un poids s’était dégagé de ma poitrine, et pourtant, les rues restaient calmes, et l’ambiance qui régnait dans la salle m’empêchait d’émettre un signe de joie.

            Les jours suivants, des choses encore plus étranges se déroulèrent. La maison devint le théâtre d’un va et vient de personnes que je n’avais jamais vues et qui s’avéraient être les collègues de mes parents. Les autres professeurs de l’université où travaillait mon père parlaient à voix basse dans le salon, un verre de vin à la main. Les rations alimentaires augmentaient en même temps que le nombre de personnes qui se pressaient dans le salon. Les ingénieurs avec qui ma mère faisait des expériences, pour le peu que j’en savais, étaient calmes et passaient la plupart du temps à écrire dans leurs carnets. Ian, quant à lui, s’occupait à dessiner des cartes du Monde Libre et Honnête -comme on l’appelait maintenant- corrigeant les anciennes frontières. Je le regardais faire et parfois me retrouvais avec des petits bonhommes dessinés au feutre sur mes mains. Mon frère me souriait alors avec une étincelle dans le regard et je courais dans la salle de bain pour me nettoyer en lui tirant la langue.

            Je passais mon temps de convalescence à déambuler dans la maison et m’extasier à chaque fois que mes parents rapportaient des aliments inconnus de mes papilles. Je découvris la douceur des fruits exotiques, et lorsque mon père me rapporta une vraie fève de cacao le goût amer resta dans mon palais pendant toute la journée. Peu de temps après, j’appris que l’école allait reprendre. Le chef du gouvernement, maintenant glorifié par son initiative, avait décidé que les enfants survivants seraient amenés dans les universités en attendant que les bâtiments soient reconstruits. Je partis donc un matin en même temps que mon père. Nous marchâmes jusqu’au train qui liait notre quartier à la grande cité. J’étais toute excitée de revoir d’autres enfants, à tel point que je me tenais debout dans le wagon, incapable de rester en place.

Nous arrivâmes finalement devant un grand bâtiment blanc, illuminé par les rayons du soleil. L’université était construite sur une quarantaine d’étage, et chaque étage était plus petit que le précédent, donnant au tout une forme pyramidale. L’ensemble semblait assez austère pour abriter des enfants. Mon père m’accompagna dans une immense salle où se trouvaient de nombreux enfants et adolescents. Je reconnus quelques élèves de mon ancienne classe et les saluai de la main. Cependant, quelque chose m’empêchait de les rejoindre, une sorte de tristesse propre à l’attentat et les espaces vides sur les chaises de mon école qu’il avait créées. Je décidai de m’asseoir à côté de deux filles blondes et d’un garçon avachi sur le rebord de la table, ses cheveux noirs bouclés cachant son visage. L’une des deux filles se retourna en me voyant arriver et me tendit la main.

-Bonjour, je m’appelle Lilou, je suis en Deuxième cycle, troisième année, et toi ? Au fait, voici ma sœur Louna, elle est en Deuxième cycle, première année, et elle n’arrive pas très bien à parler.

La fille en question leva la tête vers moi et plongea son regard dans le mien. Ses yeux gris reflétaient un tourbillon d’émotion, une tempête en pleine ébullition, comme celle qui habitait mon esprit sans relâche depuis l’attentat. Je ne pus m’empêcher de poser affectueusement ma main sur son bras, et ses lèvres esquissèrent un sourire.

-Je suis Lil, Deuxième cycle, première année. Et lui, euh, c’est qui ?

-Oh, c’est juste Adam, l’idiot de meilleur ami de ma sœur, il est en deuxième année, lui.

-Pardon ? fit le garçon en secouant la tête pour dégager les mèches qui tombaient sur son visage, quelqu’un a dit quelque chose ?

Pour la première fois depuis des jours, j’éclatais de rire avec d’autres enfants, et la vie sembla retrouver un peu de sa normalité. Il était agréable de se retrouver à un bureau et d’étudier, sans penser à ce qu’il pouvait se dérouler à l’extérieur. Etrangement, les allées et venues des amis de mes parents ne cessaient pas. Je finis par m’habituer à tous ces gens qui semblaient poursuivre un but dans ma maison, et me concentrai sur le travail scolaire. J’étais devenue amie avec les deux sœurs et Adam, qui habitaient dans un quartier de l’autre côté de la ville, et qui avaient échappé comme moi à l’explosion en prenant un bus en panne ce jour là. Cependant, Adam avait perdu sa petite sœur là-bas, et il portait toujours autour du poignet son ruban jaune. Il lui arrivait aussi parfois de manquer l’école, ou d’arriver en retard, les yeux rougis.

            Sa tristesse semblait être connectée à celle de Louna, et je voyais que quelque chose était échangé entre eux autrement que par les regards. Ils ne semblaient pas avoir besoin de communiquer pour se comprendre, et l’empathie de Louna était sans faille. Je n’avais jamais eu d’ami aussi proche et je les jalousais parfois, mais Louna était si gentille et si compréhensive que je ne pouvais lui en vouloir. Nous passions la plupart de nos récréations dans la cour de l’université, assis sur un banc, échangeant peu de mots, mais paisibles.

            Lorsque l’hiver arriva, nous finîmes par être affectés dans une vraie école, une vieille bâtisse adjacente à l’université. Louna et moi nous retrouvâmes dans la même classe, tandis que Lilou et Adam partirent avec les élèves de leur âge. A partir de ce moment, les journées se ressemblèrent toutes et nous passions la plupart du temps à travailler et à profiter des nouvelles provisions qui arrivaient petit à petit avec la fin de la guerre. Toutefois, nous continuâmes à nous retrouver à chaque pause dans la cour de l’université. Nous finîmes par redevenir des enfants comme les autres, même si l’enfance semblait avoir changé de signification. Les nouvelles qui circulaient et les discours des représentants n’interrompaient pas notre nouvelle routine, et la propagande délivrée dans nos cours ne nous semblait plus si différente de notre monde d’avant. La vie avait retrouvé un sens.

            Et pourtant, tout avait changé.

Comment j’ai trouvé mon sujet de mémoire, et autres réflexions inutiles du mois d’Août

D’après mon expérience (notamment tous les cours que j’ai eu depuis le lycée on va dire), il y a dix-mille façon d’analyser un choix. Le choix, ça peut d’abord être la conséquence de x + y avec des paramètres c. Autrement dit, on peut le calculer. Le choix, ça peut aussi être le résultat d’un processus biologique, l’enchaînement d’un stimulus ou pourquoi pas la conséquence d’un dysfonctionnement anatomique (comme choisir de fermer les yeux en sortant dehors parce qu’on sait qu’on va éternuer au soleil…). Le choix, cela peut être dans d’autres cas un acte de réflexion, l’exercice de nos neurones et ce qu’ils sont censés porter (petit raccourci = notre rationalité).  Le choix, eh bien des fois c’est aussi un non choix (souvenez-vous du jour où vous n’aviez plus que des tomates dans votre réfrigérateur…). Le choix, ça peut être le résultat de milliers d’années d’histoire humaine. Mais ce qui est important, c’est la signification que l’on donne à ce choix, et qui aura tout autant de conséquences que le choix lui-même.

Donc, là on se demande POURQUOI (enfin surtout Comment ?)  je vais étudier un truc aussi obscure que l’utilisation des ressources relationnelles et informationnelles dans le processus de choix d’orientation vers l’enseignement supérieur (ouais j’essaye grandement de vous impressionner avec mes petits mots, mais au final je vais juste leur demander s’ils consultent les brochures ONISEP…).
(suite…)